A la périphérie Est de Rouen, Saint-Léger-du-Bourg-Denis est à la limite de la ville et de la campagne, c’est son histoire que nous vous racontons…

Situation et origine :

-Saint-Léger-du-Bourg-Denis, longtemps nommée St Léger de Carville, est une commune du canton de Darnétal située dans la vallée de l'Aubette qui prend naissance à St Aubin et sillonne la commune dans toute son étendue pour se jeter dans la Seine.

- Il est difficile de savoir à quand remonte la seigneurie des Bourdeny, mais on suppose qu’elle est très ancienne…

- Il y a fort longtemps, le val d’Aubette était la propriété d’un certain Burdo, qui latinisé donne Burdinus et en français Bourdeny.. Ce charmant village est formé de trois hameaux : la Picauderie, le Vert Buisson et la Bretèque.

- La Picauderie est un fief qui remonte au 12ème siècle…
- Pour les chanoines de St Lo, elle est un fief important qui s’est agrandi au fil du temps grâce à plusieurs donations.

- Elle connut son apogée au 16ème siècle quand les seigneurs de Bourdeny, devenus des Bauquemare, devinrent successivement conseiller puis président du Parlement de Normandie…

- Puis le domaine passa dans les mains des Belbeuf. Le château de ces seigneurs, d’un style dépouillé, devint au 19ème siècle une habitation de fermiers. On peut encore admirer l’entrée qui date du 11ème siècle.

- Les limites de St léger ont changé au fil du temps, en particulier après la Révolution qui fit perdre au prieuré de St Lo sa propriété, la ferme de la Lande au profit de Bonsecours…

- A de nombreux égards, St Léger est très proche de Darnétal, au point de sembler n’en être qu’un quartier : frontière imprécise des 2 villes, même population ouvrière, mêmes activités industrielles fondées essentiellement sur le textile

- Il fallut également lutter contre l’annexion de St Léger à Darnétal.

- Le nom du village : Bourdeni que l’on faisait précédé du nom de la paroisse : St Léger (paroisse de : St Léger de Bourdeni) a vu son nom transformé en St Léger du Bourg Denis à la fin du 18e siècle probablement suite à une mauvaise retranscription manuscrite sans qu'il n'y ait jamais eu ni de bourg, ni de prénom Denis.

- On ne se douterait guère aujourd’hui, qu’il y a 400 ans, le terrain entre l’actuel viaduc du chemin de fer et la rue Framboeuf était pour une grande partie marécageux et occupé par une vaste cressonnière. Cette maison était probablement celle du propriétaire de cette cressonnière.

- Les habitants, essentiellement des ouvriers et des agriculteurs, ont subi les soubresauts de l’histoire…

 

Au Moyen âge - l’industrialisation


- Dès le moyen âge, à St Léger, de nombreux moulins sont construits sur l'Aubette pour tirer profit de l’énergie de la rivière.

- A cause de l'occupation anglaise qui dura trente ans, le village fut complètement ruiné. C'est le roi Charles VII et le brave Dunois qui chassèrent définitivement les anglais lors du siège de Rouen.

- Au XVIème siècle, il existait dans la commune 5 moulins à fouler les draps et l'activité manufacturière participait aux industries de Darnétal.

- Mais suivirent les guerres de religion et des rivalités commerciales autour de la fabrication de draps entre des drapiers de Darnétal et les drapiers de Rouen, les derniers accusant les premiers de produire des draps de moindre qualité.

C'est sous l'impulsion de Colbert que le village put se relever des secousses de la guerre. De 1707 à 1740 la population augmenta de façon considérable. Puis la teinture en rouge des Indes permit à la commune de prendre un nouvel essor. Les filatures hydrauliques remplacèrent le rouet traditionnel.

- La sente des Grecs doit son nom à des ouvriers grecs venus d’Andrinople pour mettre en place des procédés de teinturerie. En effet, ils savaient comment teindre en rouge en utilisant les racines de la garance…

- Leurs ateliers et leurs habitations étaient concentrés sur les coteaux du vert buisson et sur l’ancienne sente Bourdeny.

 

Période 19ème - 20ème siècle


- La période qui suivit la Révolution fut marquée par une valse des maires qui avaient grande peine à trouver des solutions pour lutter contre la misère de la population…

-Toutefois celle-ci put souvent compter sur la générosité des hommes fortunés de la commune.

- C’est M Boulanger, maire pendant 42 ans qui remit St Léger dans la voie du progrès. En 1850, il fit don du terrain pour construire la première mairie. Jusqu’alors il n’y avait pas de maison communale, chaque maire utilisait sa propre maison et les archives de la commune étaient remises à son successeur qui en dressait l’inventaire. Des pièces importantes devaient se perdre lors de ces déménagements.

 - Richard Waddington, naît à Rouen en 1838. Fils d’un industriel habitant la commune, il fut député, sénateur et président de la Chambre de Commerce de Rouen de 1897 à 1913 où il joua un rôle important dans le renouveau du port de Rouen. Celui-ci encouragea l’éducation, en offrant un livret de 50 francs à l’élève de chacune des 2 écoles qui aurait le mieux répondu aux questions d’un examen spécial.

 - L’école des garçons était séparée de celle des filles.

- L’instruction des jeunes filles était assurée par une religieuse. Vers 1830, le local déménagea de la rue de la Bretèque à la rue de l’Eglise (4e maison à droite en partant de l’église). Après 1858, une école sera spécialement construite par la municipalité dans le bas de la rue. Dans un premier temps, bien que l’école soit communale, les cours seront toujours assurés par une religieuse. Elle devint laïque en 1876.

- Pour les garçons, suite à de mauvaises conditions de travail, les instituteurs ne restaient pas longtemps à leur poste. L’école des garçons est créée dans le prolongement de la première mairie, rue des villages.

- Jusqu’en 1881, année de la gratuité de l’école décidée par Jules Ferry qui devint ensuite laïque et obligatoire, les pauvres n’allaient pas à l’école.

Après, ils ont été plus nombreux en classe. Il fallut un maître de plus.

 - En décembre 1847, le tiers des établissements du bourg qui compte 5 moulins, 8 filatures de coton, 2 indiennages, 7 teintureries en rouge des indes et 2 blanchisseries est en chômage complet.

- Malgré une situation financière municipale très difficile, grâce à des dons de familles aisées, des travaux de voiries furent engagés dans la commune pour donner du travail aux ouvriers de St Léger.

 - A partir de 1857, la situation s’améliora des grands travaux furent engagés : St Léger profita du nouveau tracé de voie de chemin de fer Rouen-St Quentin dans la vallée de Darnétal.

- En 1860, le pont St Lô, alors en bois et mal entretenu, fut reconstruit avec des matériaux de maçonnerie. Une conduite d’eau vit le jour partant de la source du Bois du Roule. Une seconde distribution de courrier dans la journée fut demandée.

- De 1862 à 1865, durant la guerre américaine de sécession, par manque d’approvisionnement en coton, beaucoup d’ouvriers se retrouvèrent sans travail.

 - D’autres personnes ont ponctué la vie de St Léger et la commune leur a rendu hommage en dédiant des rues à leur nom. Parmi elles, on peut citer Eugène Lavoisier qui a développé l’entreprise de filature de son père…

- Il résidait dans l’actuel château George Sand et pendant 35 ans il a été le maire de la commune…

- La famille Blondel, quant à elle, a exploité une usine de teinturerie qui a fonctionné jusqu’en 2010…

- On sait également que la mère de Guy de Maupassant a résidé dans la commune à l’époque où son père, M Lepoittevin possédait une entreprise.

Malheureusement il fit faillite et à sa mort Sa veuve retourna avec sa fille Laure à Fécamp.

- A la sortie de St Léger en allant à St Aubin, la scierie Philipart s’établit en 1933 non loin du vieux château. La scierie prit place dans les locaux de la filature construite au siècle précédent pour le compte des demoiselles de Belbeuf.

 - St Léger possédait de nombreuses belles maisons car une bourgeoisie locale s’était constituée une confortable fortune grâce aux industries avoisinantes.

 

Architecture


Durant tout le XIXe siècle, dans un pays où manque la pierre, la construction est entièrement en briques : les briques de premier choix, aux arêtes nettes et de couleur vive, sont réservées pour les angles du bâtiment, les pieds-droits et les arcs ; celles de second choix sont au contraire employées dans les épaisseurs des murs et recouvertes d'un enduit.

Secours mutuels de St Léger du Bourg Denis

En 1851, un système d’assurance contre les arrêts de travail provenant de la maladie et de la vieillesse est mis en place dans la commune. C’est la société de secours mutuels de St Léger du Bourg Denis qui est l’ancêtre de notre sécurité sociale. Malheureusement, on peut constater qu’en 1890, beaucoup, par faute de moyens financiers, délaisse cette mutuelle.

 

Les Pompiers


En 1852, le conseil municipal fit l’achat d’une pompe à bras et organisa une compagnie de pompiers dans la commune dont l’effectif était de 26 personnes et qui a augmenté au fil du temps. Lui était adjointe l’activité de la fanfare municipale. Jusqu’alors, le matériel ne se composait que de quelques seaux déposés à la mairie et les seuls secours efficaces venaient des pompiers de Darnétal.

 

Les guerres récentes


- En 1870, des tranchées furent édifiées pour retarder l’arrivée des prussiens. M. Waddington organisa, comme capitaine, l’artillerie des mobilisés de la Seine Inférieure pour défendre, entre autres, les villes du Havre et de Rouen. Vainqueurs les dragons prussiens établirent un camp de 800 à 900 soldats dans la commune et la frappèrent d’une contribution de guerre que St Léger eut beaucoup de mal à payer.

 - St Léger traversa les deux guerres mondiales et fut meurtrie par les pertes humaines occasionnées par celles-ci. Lors de la seconde guerre mondiale, la ville fut occupée par les troupes allemandes…

- Certaines familles ont participé à l’exode.

- En 1944, avant la libération de la ville, pour empêcher la progression des troupes alliées, les allemands dynamitèrent le pont de chemin de fer provoquant des destructions aux habitations avoisinantes à l’entrée de St Léger. Ils avaient pris la précaution de faire évacuer les habitants.

- Le 29 août 1944, venus des plateaux par le chemin des Trésoriers, des chars canadiens pénétrèrent dans Saint Léger et libérèrent la commune, la veille de la libération de Rouen.

 

L’église


- L’église date de 1553.

- Durant le moyen-âge, l’église est consacrée à St Léger. Avant la révolution, elle servait de lieu de pèlerinage aux ouvriers polisseurs de pierre à mouture des moulins de Rouen qui s’y rendaient chaque année pour recevoir la protection du Saint. L’eau de la source proche avait, dit-on, une efficacité pour les maux d’yeux.

- Incendiée en 1562 lors des guerres de religion, objets du culte vandalisés et mobiliers dispersés durant la révolution, elle fut sauvée grâce à un agriculteur propriétaire d’une partie de la cote au dessus de la rue du Cantony qui se proposa de l’utiliser comme grange pour son foin. En 1802, la tourmente passée, il la rendit au culte.

- Par manque d’entretien, en 1832, l’église menaçait de s’effondrer : lézardes de la façade et d’un mur latéral, toiture en tuiles délabrée, …elle avait l’aspect d’un monument qui tombait en ruine. Des étais furent posés pour consolider l’ouvrage.

- En 1836, la situation financière n’étant pas favorable, le maire secondé par le curé, fit une souscription pour constituer un premier apport. Le conseil municipal, adopta ensuite le devis de l’architecte pour la réparation et la restauration. Malheureusement, l’architecte ne sut pas conserver la beauté originale de l’édifice. Il la modernisa en supprimant une partie de son aspect gothique : destruction de la belle porte avec sa riche arcature, destruction des meneaux des fenêtres (montants et compartiments en pierre de taille), destruction des belles verrières peintes de la fin du XVIe siècle qui faisaient une des richesses de l’église. Toutes les fenêtres furent déformées, leur ouverture ogivale fut modifiée sans style en les remplissant d’un verre blanc entouré d’une bordure de carreaux bleus. Les murs furent surélevés pour remplacer les voûtes ogivales en bois par des voûtes semi circulaire en plâtre. A l’extérieur un ravalement en plâtre fut nécessaire qui jure si étrangement. Les bancs furent déplacés à La Bouille, le retable en bois sculpté fut remplacé par un retable en plâtre et bois peint. La commission des antiquités s’émut de ces transformations qui altéraient le caractère de l’église.
- En 1855, M. Boulanger fit don de l’orgue à l’occasion de la première messe de son frère ordonné prêtre. En 1861, la cloche fendue, indispensable pour alerter la population en cas de danger, nécessita son remplacement et l’adaptation du clocher qui fut surélevé.

Pour ces travaux, des pierres furent récupérées d’une église de Rouen que l’on démolissait. Malheureusement, de nouveau ces travaux furent fait dans le style moderne de 1838. M. Boulanger fit don de l’horloge pour le clocher.

- En 1877, le plafond du chœur, modifié 40 ans plus tôt, menaçait de s’effondrer. Il fut refait dans le style primitif et on en profita pour remodeler dans le style gothique d’origine les 4 fenêtres du chœur et les vitraux correspondants. 3 furent le don de 3 familles et le 4e est dû à la souscription des habitants. Le retable de l’autel fut supprimé.

 

La chapelle Ste Marguerite


- La chapelle Ste Marguerite doit son nom à la chapelle du moyen âge dépendant de la léproserie qui était située en bas de la côte de Bonsecours. Et qui permettait aux malades de vivre à l’écart. Démolie à la révolution, elle fut reconstruite route de Lyons, attenant à une école privée.     
 

Dans les années 60, à l’initiative de l’abbé Gilbert Lemaire, la chapelle actuelle vit le jour, rue de la Picauderie, à la place d’un bâtiment qui servait au patronage, au milieu d’un lotissement créé par l’abbé Pierre.

- Jean René Rouzé, aumônier des artistes, l’a décoré par un crucifix sculpté et des tableaux. Il fut le dernier curé de la paroisse. Comme partout dans le diocèse, les paroisses sont regroupées. La nouvelle paroisse Sainte Marie Madeleine de Darnétal – Val d’Aubette est constituée des communautés de Darnétal, de St Léger et de St Aubin.

 

Conclusion


- Nous sommes loin aujourd’hui de ces moments pénibles et force est de constater que St Léger a réussi à cultiver un certain art de vivre en conjuguant croissance et patrimoine naturel et industriel…
- Les Bourdenysiens réunis autour de la devise « Bien vivre à St Léger » espèrent encore longtemps profiter de ce cadre qui allie les bienfaits de la ville à la campagne.

Montage
Textes :

  • Avec la participation de Mme Florence Limare et de sa classe du CE2 année 2005-2006
  • Documents et informations fournies par Jean Maurice Boittout
  • Utilisation de la « Notice de St Léger du Bourg Denis » écrite en 1890 par M. Roussignol instituteur.

Commentaires : Lus par Alice, Bruno, Claire et Julie, voix synthétiques d’Acapela